lundi 17 août 2009

18 août 1789 : la Révolution liégeoise oubliée...

Combien de Liégeois savent qu'un mois après la prise de la Bastille à Paris, les Liégeois firent aussi leur Révolution ? On l'enseignait autrefois dans nos écoles, dès les études primaires. Mais ce temps n'est plus...On cultive à présent la "citoyenneté", en oubliant que les premiers citoyens furent les Français !
Qu'un événement aussi capital que la Révolution française ait eu une résonnance particulière sur les bords de la Meuse, au point que 1789 est aussi une date essentielle de l'histoire de Liège, n'a rien qui doive surprendre. Depuis des siècles, les démocrates liégeois avaient les yeux tournés vers la France. Rappelons-nous Sébastien Laruelle, bourgmestre de Liège, lâchement assassiné en 1637 parce qu'il était le chef du parti français dans la Principauté. Les historiens y voient un précurseur de la Révolution liégeoise. Un des premiers gestes des patriotes liégeois fut en effet de faire bénir les drapeaux de la Révolution en l'église Saint-Martin-en-Isle, sur les tombes de Laruelle et de Beeckman, "illustres martyrs de la liberté"(1).
Rappelons brièvement les faits.
Les Parisiens prennent la bastille le 14 juillet 1789. Un mois plus tard, éclate à Liège "l'heureuse Révolution" du 18 août. Le prince-évêque Hoensbroek, après avoir fait mine d'accepter la révolution, s'enfuit. Le 26 août, c'est au tour du pays de Franchimont de se révolter. S'ouvre alors le congrès de Polleur qui, le 16 septembre, vote une Déclaration des droits de l'Homme plus radicale encore que la française. Le 14 juillet 1790, Liège est représentée à la grande fête de l'Unité française organisée à Paris. Le 12 janvier 1791, l'armée autrichienne envahit Liège et y rétablit l'Ancien régime. Les patriotes liégeois se réfugient en France. Le 28 novembre 1792, les troupes françaises, commandées par Dumouriez, libèrent Liège. Une Convention nationale liégeoise est élue au suffrage universel. Le 16 janvier 1793, un plébiscite est organisé. A une très grande majorité des votants, le peuple liégeois réclame la réunion du Pays de Liège à la France. Ce voeu est accepté par la Convention nationale française qui, le 8 mai 1793, vote un décret "portant réunion du pays de Liège à la France". Entretemps, les Autrichiens ont réoccupé Liège depuis le 5 mars. Cette deuxième occupation autrichienne durera jusqu'au 27 juillet 1794, date à laquelle l'armée française libère Liège définitivement. En s'enfuyant, les Autrichiens incendient le quartier d'Amercoeur que Bonaparte, Premier consul, fera reconstruire. Un an plus tard, le 1er octobre 1795, la Convention nationale adoptera une "Loi sur la réunion de la Belgique et du Pays de Liège à la République Française"(2). Liège deviendra alors, pour 19 ans, le chef-lieu du département de l'Ourt(h)e, préfiguration de la Province actuelle.
Quelques semaines avant l'arrivée des Français à Liège, André-Modeste Grétry écrivait, le 4 novembre, à son ami Rouget de lisle, l'auteur de la Marseillaise : "Un de ces jours, mon pays de Liége sera français. J'en suis enchanté, j'en suis tout fier...(3)
Et voici ce que Jean-Nicolas Bassenge, porte parole de la dfélégation liégeoise, déclara à la barre de la Convention nationale, à Paris, le 8 mai 1793 : "Nous venons remplir le plus saint, le plus cher de nos devoirs. Nous venons offrir à la France de nouveaux enfants dignes d'être adoptés par elle(...) Les Liégeois sont Français. C'est un département frontière envahi par l'ennemi commun qui se jette dans les bras de ses concitoyens(...) Leur voeu, prononcé par tous les coeurs, est de voir leur pays partie intégrante de la grande famille...(4). Le jour même, la Convention nationale votait le rattachement du Pays de Liège à la France.
(1) Voir le Journal patriotique, tome I, pages CXXXVII-CXXXIX, Tutot, 1789.
(2) On aura remarqué la distinction entre le Pays de Liège et la "Belgique"...
(3) Voir Georges de Froidcourt, Grétry, Rouget de Lisle et la Marseillaise, Liège-Paris, 1945, page 59.
(4) Adresse des président et secrétaires de l'Administration générale du pays de Liége (8 mai 1793), imprimée et envoyée aux départements par ordre de la Convention nationale, Arras, 8 pages, imprimerie de la citoyenne Varlé.
Postez des commentaires. Lisez ceux qui sont déjà publiés. Donnez votre avis sur les messages et les commentaires.

7 commentaires:

Marc HANSEN a dit…

Ainsi, à la lumière de l'Histoire, il parait évident que la célébration du 14 juillet à Liège a un sens politique majeur qui prime sur tous les autres (festif, loisir, etc.). Et cela, hélas, de trop nombreux liégeois l'ignore actuellement. Merci, M. Schreurs de rappeler ces faits historiques à tous les liégeois car sans mémoire, un peuple ne peut construire son identité, et sans identité, il ne peut bâtir son avenir. Jadis, lors de ces révolutions française et liégeoise, les enjeux politiques semblaient bien plus clairs aux yeux des liégeois qu’aujourd’hui. A l’époque, il sautait aux yeux que le Pays de Liège devait adhérer à la France. Mais … l'arrivée de la België-ique a brouillé toutes les cartes, nous a confisqué notre destinée, a endormi toutes les mémoires. A nous de les réveiller !

Anonyme a dit…

Bonjour Monsieur Schreurs,
Pourquoi ne pas adresser ce billet à Monsieur Quatremer ou à un de ses confrères de votre choix. Lorsque Paris publie une nouvelle claironnante, les "feuilles de choux" de la "communauté française" résonne parfois des échos provoqués ?
Bonne journée.
Paul COCHE.

C. Thayse a dit…

On a dit que l'information, c'est le pouvoir. C'est vrai, mais la connaissance de l'Histoire, c'est maîtriser l'avenir.
Je suis toujours effrayé devant l'analphabétisme historique desnos contemporains et particulièrement des "militants néo-rattachistes"...

L'un d'eux vient de m'écrire pour me demander de supprimer le lien vers votre blog qu'il juge fasciste... Comme quoi, on peut militer dans un parti qui se veut le "seul continuateur du Mouvement wallon (qui pourtant n'appartient à personne) et des valeurs de la République et vouloir interdire la liberté de parole... Continuez !

Georges Lambert a dit…

Ces militants néo-rattachistes, non seulement ne connaissent pas le passé de la Wallonie et du Mouvement wallon, mais ILS REFUSENT DE LE CONNAITRE !Pour eux ,c'est du "passé", c'est donc "dépassé", "vieux", inintéressant... Quant à l'accusation de site "fasciste", c'est grotesque, de la part de gens systématiquement et bêtement anti-flamands. Ils n'ont même pas l'excuse des nationalistes flamands qui défendent leur langue sur LEUR territoire; ils veulent imposer la leur en Flandre. C'est eux qui sont impérialistes et racistes.

Joseph Senny a dit…

Bien que membre du RWF, je me sens très proche des idées que vous défendez. Je ne manque pas de les relayer lors des réunions des membres, semant parfois une certaine confusion dans l'assemblée. Je ne m'en soucie pas. J'espère consulter votre site longtemps encore. Il y a un temps pour parler, d'accord, mais le temps de se taire n'est guère arrivé.
Avec mes salutations républicaines,
Joseph SENNY, Filot-Hamoir.

Eric Basso a dit…

Je connais suffisamment le glorieux passé de Liège (sans en être un spécialiste, loin de là !) pour que la situation actuelle me peine. A mes yeux, c'est Liège qui devrait donner l'impulsion sur le plan réunioniste. Or nous sommes loin du compte, et pas seulement parce que le RWF y stagne à 1 % ! En fait, je crains que la plupart des Liégeois n'aient tout oublié des exploits de leurs prédécesseurs : ce sont, eux aussi, des victimes du Système belge, de la machine à décerveler qui fonctionne avec efficacité !
Notez qu'on peut en dire autant de Tournai, Virton, Mariembourg, Philippeville, Thuin, etc. Et même de Namur, si l'on songe, par exemple, à la retraite de l'armée Grouchy, en juin 1815.
Insister sur ces événements ne plaît guère aux belgicains, qui préfèrent récrire l'Histoire à leur manière.

Marc HANSEN a dit…

Chers amis et amies,
De nos jours, si l’on veut acquérir soi-même rapidement une connaissance quelque peu approfondie du passé, il n'est plus nécessaire de faire de belles grandes études (1) ni encore moins d'acquérir de beaux livres d'histoires qui parfois coûtent très cher (2). Il existe un moyen tout simple: l'Internet. C'est facile, direct et gratuit ! Des constructeurs de sites vous livrent ce qui vous intéresse sur un beau plateau d'argent. Ainsi, je ne puis que vous recommander déjà trois adresses passionnantes. Vous en ferez des "copier-coller".
La première: http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Principaut%C3%A9_de_Li%C3%A8ge
vous amène sur la page intitulée « Révolution Liégeoise » de l’encyclopédie en ligne Wikipédia.
La deuxième:
http://perso.infonie.be/liege06/12douze.htm#12/1
vous amène sur la page intitulée « Vers la Révolution » du site « Une très bonne histoire de la Principauté de Liège, avec une chronologie ».
Et enfin, la troisième:
http://perso.infonie.be/liege06/12douze0.htm#12/2
vous amène sur la page intitulée «La révolution liégeoise » située sur le même site que la deuxième adresse.
Une très bonne lecture et aussi une bonne recherche à tous et à toutes.

(1): Si vous en avez déjà fait, bien évidemment tant mieux pour vous !
(2): Si en avez déjà, tant mieux aussi !