vendredi 14 août 2009

Une diabolisation contre-productive

Certains sites rattachistes font mine de s'émouvoir du comportement collaborationniste d'une partie du Mouvement flamand pendant la dernière guerre mondiale, comme d'ailleurs des élucubrations du Werkgroep Baarle qui voudrait reconstituer les anciens Pays-Bas en...oubliant que la principauté de Liège n'en fit jamais partie(1).
Cette stratégie est claire : convaincre les Wallons et les Bruxellois que les Flamands sont de mauvais belges. Ce faisant, elle suscite en eux, sans que leurs auteurs s'en rendent compte, non un désir de séparation et d'indépendance, mais une réaction patriotique belge ! En effet, les Flamands qui ont collaboré avec les Allemands en 1940-44 ont trahi non pas la Flandre, leur vraie patrie, mais la Belgique. Le leur reprocher, c'est donc se placer dans une optique essentiellement belge.
Peut-on reprocher aux Flamands cette collaboration, dès lors que l'on est, comme les rattachistes wallons, partisan d'une collaboration - c'est le moins qu'on puisse dire - avec la France ? Si la République, pour parer l'invasion allemande, avait pénétré en Belgique en septembre 1939, qu'auraient fait les soldats wallons ? La plupart auraient refusé de tirer sur les Français et beaucoup auraient même rejoint leurs rangs. Ou est la différence ? Il ne faut pas confondre les Allemands avec les nazis. C'est l'armée allemande qui nous a envahis et occupés, comme cela avait déjà été le cas en 1914, époque où elle s'était d'ailleurs montrée plus barbare qu'en 1940.
Pour le Mouvement flamand, c'était l'occasion ou jamais de réaliser l'indépendance de la Flandre: Nu of nooit, disaient les séparatistes. Par contre, les rexistes et les soldats de la Légion Wallonie - qui portaient sur la manche non pas le coq wallon mais l'écusson belge -ont été, eux, des traîtres à leur patrie wallonne et à la Belgique francophone.
Après avoir diabolisé M. Johan Sauwens, le ministre flamand qui avait participé à une réunion d'anciens volontaires flamands sur le front de l'Est, des rattachistes s'en prennent à présent à M. Jan Peumans, vice-président de la N-VA et président du nouveau Parlement flamand, parce qu'un frère de son père - qui fût assassiné sous les yeux de ses enfants - avait collaboré avec l'occupant. Selon eux, M. Peumans devrait "rompre publiquement avec ce passé familial indigne de ses hautes fonctions" au nom de l'humanisme et de la démocratie. Ces rattachistes mettent d'ailleurs dans le même panier feu Hugo Schiltz, M. Bart De Wever et d'autres. Outre que nul ne peut demander à quelqu'un de renier un père, ou un oncle, le cas des personnalités citées ne nous concerne pas, nous Wallons, pas plus que les Flamands n'ont à se prononcer sur le comportement de certains hommes politiques wallons.
Nous doutons donc que cette stratégie, qui fait davantage appel à des sentiments"belges" que wallons, soit utile. Elle nous paraît même contre-productive. Il serait préférable, à notre avis, que les rattachistes disent et redisent aux Wallons que la différence de comportement des Flamands et des Wallons est normale, parce que la Belgique se compose en fait de deux pays quasi-étrangers, distincts non seulement par leur langue nationale, mais aussi par leur culture, leur genre de vie, leurs sentiments, leurs votes et leurs aspirations politiques. La guerre, précisément, a été un révélateur de cette profonde différence. S'en indigner, c'est rester dans l'optique "belge" que combattent normalement les rattachistes.
(1) Pour le groupe de Baarle, on trouvera une analyse objective sur le blog de Didier Mélin. Dans un autre domaine, signalons également un article intéressant sur le blogue-notes de Claude Thayse, au sujet de la Communauté française. Cliquer sur les liens ci-contre.
Postez des commentaires, mais lisez d'abord ceux qui ont déjà été publiés.

9 commentaires:

Philippe Rasquin a dit…

Votre raisonnement est juste,mais je voudrais faire deux observations:
1) Les affinités entre Flamands et Allemands peuvent elles être comparées à celles qui existent entre Wallons et Français ? Ce sont des cousins "germains", mais ils ne parlent pas exactement la même langue, comme c'est le cas des Autrichiens par exemple.
2) Y a-t-il eu une collaboration semblable aux Pays-Bas, dont les Flamands - mise à part la religion - sont plus proches que des Allemands ?

Jacques Dujardin a dit…

Je crois en effet que l'analyse est bonne; mais qu'il faut l'affiner.
Les Flamands étaient peut-être surtout anti-français, plus que pro-allemands. N'oublions pas que le cri de guerre du Mouvement flamand, à partir des années '30, était "Los van Frankrijk"! C'est sous leur influence et celle du roi Léoplold III que le gouvernement belge dénonça les Accords militaires franco-belges conclus après la fin de la première guerre mondiale. Seuls les Wallons protestèrent. Et puis, c'était peut-être surtout l'occasion pour les séparatistes flamands de réaliser leur rêve de création d'un Etat thiois indépendant. D'où le slogan "Nu of nooit", c'est-à dire "maintenant ou jamais". Enfin, la Flandre était nettement plus à droite que la Wallonie, d'où une plus grande perméabilité au thèses nationales-socialistes.
Tous ces élément ont du jouer, autant si pas plus que leur cousinage avec l'Allemagne.

Eric Basso a dit…

Il s'agissait pourtant d'un engagement idéologique, l'adhésion à un Ordre nouveau voulu par Hitler, que certains nationalistes flamands vénéraient. Cette vénération ne s'est pas éteinte, elle subsiste, en tapinois, dans des milieux proches d'un parti voué, paraît-il, à une opposition permanente, voire à un ostracisme sans faille (mais tel ne fut pas le cas le 7 novembre 2007...).
En outre, les plus déterminés de ces nationalistes flamands s'exprimaient dans un allemand parfait, ce qui, mine de rien, n'est pas donné à tout le monde, même en Flandre...
La République française n'a pas envahi le territoire belge avant l'attaque allemande. Elle était bien trop respectueuse de la neutralité belge pour s'y risquer ! Quoi qu'il en soit, la IIIe République demeurait un régime démocratique, du moins avant de commettre la faute de plébisciter Pétain. La comparaison avec les compromissions du nationalisme flamand est donc sans objet, et je dirais même qu'elle est déplacée.

Marc HANSEN a dit…

A présent, nous sommes en 2009. Le point commun entre les nationalistes flamands et les rattachistes wallons est la séparation, en d’autres termes, LE DIVORCE BELGE. C'est la seule chose que nous devons regarder actuellement car c'est l'unique clé qui peut nous ouvrir la porte d'une opportunité historique d'arrimage de la Wallonie à la République Française. C'est cela l'essentiel car nous devons regarder vers l’avenir. Pardonnez-moi mais tout le reste, sans préjuger de l'intérêt qu'il peut susciter chez les uns et les autres, est secondaire car il ne fait l'objet que de débats d'Histoire, autrement dit du passé. Le jour où nous serons rattachés à la France, une autre Histoire s’écrira : enfin la nôtre.

Jean Petit a dit…

Certes, la IIIè République n'a pas envahi la Belgique et c'est peut-être regrettable,car c'est la Belgique et non la France qui a voulu cette stupide politique de neutralité en dénonçant les accords militaires avec la France.
Mais la Première République n'a pas hésité à le faire et les Français ont été accueillis en Wallonie, spécialement à Liège, non en envahisseurs mais en libérateurs.Je ne vois donc pas en quoi la comparaison est déplacée.Si l'armée française avait pénétré en Belgique en 1939 et s'était massée à la frontière belgo-allemande, elle aurait peut-être pu empêcher l'invasion allemande.

Guy Doneux a dit…

@ à Marc Hansen et à Eric Basso :

Certes, nous sommes en 2009 et il faur regarder vers l'avenir. Mais c'est le RWF qui, sur son site officiel, rappelle des événements d'il y a 65 ans et demande au président du Parlement flamand de renier le passé de sa famille pour des faits de collaboration, alors que la seule chose à dire est que les Flamands et les Wallons se sont comportés différemment pendant la guerre parceque ce sont deux peuples tout-à-fait différents.
Notre rôle de rattachistes est d'insister sur cette différence sans porter de jugement sur les comportements des deux peuples, mais en soulignant qu'entre ces deux peuples si différents, une alliance est possible pour sortir ensemble de la Belgique. Ainsi, chacun pourra suivre son destin : l'indépendance pour la Flandre ou, si elle le souhaite, une confédération avec les Pays-Bas, et pour la Wallonie une union avec la France. Que les séparatistes flamands ne renient surtout pas le passé collaborationniste d'une partie importante du Mouvement flamand, car ce passé illustre bien que, comme disait Jules Destrée, "il n'y a pas de Belges, mais des Flamands et des Wallons". Des Flamands pro-allemands et des Wallons profrançais, voilà ce qui doit ressortir, sans jugement.

Josette Shipers a dit…

Le parti "RWF" reste aussi dans une optique belge eu voulant défendre les hahitants francophones des six communes autour de Bruxelles.

Claude Lemmens a dit…

Parmi les liens de "Liège-France", il y a celui vers "Wallonie-France". J'ai cru qu'il s'agissait de l'excellent périodique publié par monsieur J. Liénard, mais c'est en fait le blog d'un rattachiste, monsieur Thirion. Sous le titre "Il serait grand temps que les yeux des Wallons s'ouvrent sur la réalité de demain", Mr Thirion attire l'attention, à propos du "groupe de Baarle", sur une évolution des objectifs de Benelux, qui serait pourvu d'une sorte de parlement consultatif pouvant adresser des avis et des recommandations à l'Union européenne, en matière culturelle autant qu'économique. L'auteur redoute que cette évolution ne fasse "encore perdre à la Wallonie de son identité latine".
Qu'il s'agisse du Benelux ou de la Confédération avec les Pays-Bas incluant la Wallonie, imaginée par le groupe de Baarle, aucun de ces fantasmes ne pourra se réaliser si la Wallonie s'y oppose, ce qui sera évidemment le cas. Le danger est donc inexistant si les hommes politiques et les parlementaires wallons sont bien informés.Il suffirait d'attirer leur attention à ce sujet par un courrier personnalisé bien documenté.

Georges Lambert a dit…

Les néophytes font souvent la mouche du coche, c'est bien connu. Le bloggeur de "Wallonie-France" ne fait pas exception à la règle. Il chicane M.Lemmens parce que celui-ci aurait confondu le "Parlement Benelux" et l'Union européenne. La belle affaire ! je suppose que M. Lemmens voulait surtout insister sur le fait que ce Parlement ne peut voter que des recommandations, dont le parlement de chaque Etat fera ce qu'il veut. De toutes façons, ce ne sont pas des accords sur la permission aux ambulances de franchir les frontières, la collaboration entre les services d'incendie des trois Etats, la dépollution de la Meuse et la protection des poissons dans les cours d'eau qui vont mettre en péril l'identité latine de la Wallonie...On a envie de dire à ce néophyte : "rastrind" !