jeudi 29 octobre 2009

Langue de bois et bruits de couloir...

Dans un excellent article que publie La Libre, Eric de Bellefroid dénonce, avec talent, cette langue de bois, frigide et insensible, dont nous sommes tous victimes aux temps de la pensée unique et du 'politiquement correct' . Il signale la parution récente d'un ouvrage de Christian Delporte, Une histoire de la langue de bois(1), qui nous éclaire sur cette nouvelle pathologie de la parole s'apparentant aux "novlangues" prédites par Georges Orwell.
En veut-on un exemple, tout-à-fait actuel ? Voici : le discours dominant a fait désormais de l'immigré un allochtone, de l'aveugle un déficient visuel, du camping une hôtellerie en plein air, de la prostituée une travailleuse du sexe, et du mensonge lui-même une contre-vérité. Pour être bref, enfin n'est-ce pas disons, il va sans dire quà la limite, dans une certaine mesure, tout cela nous "interpelle quelque part au niveau du vécu"...Après le "franc-parler", on a inventé le "parler-vrai", mais aussi le "mentir -vrai"...
M. de Bellefroid aurait pu ajouter que ce discours fait de la Flandre le nord du pays, de la Wallonie le Sud, des nationalistes flamands des flamingants et des Flamands des néerlandophones, comme s'obstine à dire M. Di Rupo, ce fils d'allochtone qui, comme beaucoup de nouveaux belges, n'a pas encore compris qu'il y a dans ce "pays" deux nationalités. Quant à BHV, le vaste ensemble du personnel politique belge a beau nous en expliquer "très clairement la problématique" , nul n'y entend goutte.
Mais la langue de bois , si elle accompagne souvent la pensée unique, n'empêche pas les bruits de couloir. C'est précisément le cas de la scission de BHV, pour laquelle, écrit Le Soir, il y a une revendication phare au Sud...Quelle est cette revendication ? Relier Bruxelles à la Wallonie, pour que la Capitale ne soit pas encerclée en Flandre. Pour cela, il y a deux scénarios : un minimum et un maximum. Le minimum, c'est la création d'un couloir, d'un corridor de 3,5 km de long et de 2,5 km de large, à gauche de la chaussée de Waterloo, en incorporant une partie de la forêt de Soignes. Le maximum, c'est l'élargissement de Bruxelles aux six communes de la périphérie dont, au Sud, les communes de Drogenbos, Linkebeek - des toponymes bien français! - et Rhodes-Saint-Genèse.
Il y a fort peu de chances pour que partis flamands, même les Verts de Groen, acceptent le deuxième scénario, puisque, comme l'admet Le Soir, ils ne veulent pas céder un pouce de leur territoire. Reste le scénario minimum, que François Perin appelait la solution du pédoncule, autrement dit, selon le Larousse, la queue d'une fleur ou d'un fruit... Outre le côté un peu ridicule de cette solution, qui illustre bien l'absurdité que constitue la Belgique, et l'inconsistance de la "Communauté française", elle fait aussi penser au "couloir de Dantzig" de sinistre mémoire.
Quant on vous dit que Bruxelles est la pierre d'achoppement et que sans elle, la Belgique serait déjà scindée depuis longtemps, à l'instar de l'ex-Tchécoslovaquie ! C'est le résultat de deux phénomènes : la francisation d'une ville et d'une région originairement flamandes et la centralisation excessive et oppressante de cette capitale pendant un siècle, centralisation dont la Wallonie a autant souffert que la Flandre...
(1) 2009, Flammarion, 350 pages.
Postez des commentaires, exprimez votre avis. Pour rappel : vous trouverez une carte détaillée de l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde à la fin de cette série de messages

10 commentaires:

Heraus a dit…

En même temps, si comme les statistiques tendent le prouver, Linkebeek est à 80% francophone, il faut bien avouer que le passé flamand de cet ancien village pèse peu. Je ne pense pas que le problème soit au fond la francisation de territoires indubitablement ethno-culturellement flamands à l'origine parce qu'il suffit de regarder une carte de la France septentrionale pour vite comprendre que ce phénomène de francisation est vieux de 1000 ans.

Il faut être réaliste : ces territoires sont perdus pour la culture flamande. Et c'est là le problème majeur pour la Wallonie car ces territoires ne sont pas gagnés pour la culture wallonne. Entendons par là que sociologiquement, cette nouvelle francophonie bruxelloise qui n'a pas 100 ans, tout en ayant les défauts des nouveaux convertis (morgue francophonissime), n'a pas le courage intellectuel de la vieille terre romane wallonne de s'admettre française. Bref, il faut acter du fait que Bruxelles a créé son propre univers "belgissime", qui effectivement s'étend au delà des limites de la communauté éponyme mais que c'est aux Bruxellois à faire la preuve de manière autonome de la défense de cette nouvelle culture. Et in fine, à eux de négocier leur existence avec les Flamands. Parce que pour les Wallons, il y aura toujours d'interminables kimomètres de terre flamande à traverser que l'on vienne d'Enghien ou de Jodoigne. Je crois parfois qu'il faut regarder une carte et constater à quel point Bruxelles est enclavé en Flandre, Waterloo n'étant qu'une avancée extrême et récente de la culture romane (le XVIIIème siècle).

Renal a dit…

Waterloo, nom à consonnance flamande, je propose une annexion à la Flandre... Comme quoi, quand on s'engage dans ce type de non-argument, on peut tout dire et son contraire... Selon votre raisonnement, un patronyme de ville ou de personne pourrait servir à en déterminer l'origine ethnique: vous êtes l'exemple même que ce type de raisonnement ne mène à rien. Les Bourgeois (NVA) ,Anciaux (SPa), Jambon (NVA) sont des Flamands pur jus et pourtant leurs noms sonnent bien français... Stop à ce genre d'arguments qui ne font que singer les attitudes paranoïaques flamingantes afin de tenter de justifier l' "injustifiable"... Bruxelles a été un gros bourg flamand et la présence flamande y est légitime mais personne ne peut accepter les politiques agressives mises en place à l'encontre des francophones de Bruxelles sous des pseudo-prétextes historiques.
Bien à vous.

Heraus a dit…

Ce n'est pas honnête de prendre l'exemple de Waterloo : il est vraiment l'exception qui confirme la persistance de la frontière linguistique depuis des millénaires en Belgique (alors que côté français, il y a eu francisation sur des kilomètres, la toponymie étant flamande sur une ligne qui va du Touquet à Lille où elle rejoint la frontière belge plus stable même si décalée au Nord de quelques communes : Oeudeghien, Wodecq, Hellebecq, Rebecq, ... cachent mal leur origine néerlandaise).

Parlons franchement : oui, ces anciennes terres flamandes de France partagent énormément avec la Flandre belge et si la langue s'y est perdue, sauf dans le Westhoek, il s'agit de la même culture, des mêmes paysages. Oui, à la lisière de la Flandre et de la Wallonie, les deux mondes sont assez mêlés. Mais est-ce ça la Wallonie ? Résume-t-on un pays à ses marges ? La Wallonie que je connais, c'est celle de la vallée de la Meuse et de l'Ardenne, continuités exactes de la France. La Belgique est tout de même l'assemblage croquignolesque de francophones de l'Ardenne et de néerlandophones des côtes de la mer du Nord. S'il fallait unir à ce point les Flamands avec des francophones, c'était avec ceux de l'Artois, du Calaisis et de la Flandre française ? Au nom de quelle blague de l'Histoire les Ardennais se retrouvent-ils à parler d'Anvers comme de leur patrimoine ?

A. Dubois a dit…

Ce qui est triste, c'est que même chez les rattachistes, certains pratiquent la "langue de bois" et la "pensée unique". Pas vous, bien sûr, à Liège-France, ni sur les autres blogs indépendants, mais bien sur le site officiel du RWF et surtout à l'intérieur du parti: Il faut penser comme le président et son bureau exécutif, sinon on est taxé de déviationniste et on va jusqu'à vous menacer d'une action en justice ! On n'a pas le droit de se réunir quand on veut et avec qui on veut...C'est désolant, alors que le RWF devrait donner l'exemple du débat démocratique et de la liberté de réunion et d'expression, puisqu'il se réclame des valeurs de la République française.Cela me déçoit vraiment.

Lars a dit…

Beauval, Notre-Dame aux Bois, Grand Bigard, Wuluwe Saint-Etienne, etc. : des noms bien flamands évidemment. Continuez. Merci.

Un administrateur a dit…

Beauval est un tout petit coin dela grande commune flamande de Grimbergen, Notre-Dame-aux-Bois d'Overijse et Woluwe-St-Etienne, n'en parlons même pas. Ce sont des tentacules, des sortes de petites colonies comme celles des Israéliens en Palestine...Voyez la carte à la fin des messages, elle est parlante !

Heraus a dit…

Niez la réalité comme vous le faites ne permettra pas une discussion sérieuse avec les Flamands qui eux connaissent l'Histoire. ce sont des toponymes du XIXème, en partie liés à l'extension urbaine, généralement des traductions du néerlandais !

Je vous invite à survoler la limite linguistique via Google Maps.

http://maps.google.fr/

Ou cet article sur la romanisation de Waterloo :

http://books.google.fr/books?id=lA1TdXtyxnEC&lpg=PA196&dq=fronti%C3%A8re%20linguistique%20waterloo&lr=&as_brr=3&pg=PA187#v=onepage&q=&f=false

Lars a dit…

Je cite: "Vous n'êtes pas d'acord ? Dites-le, postez des commentaires."

Pourquoi dès lors couper les commentaires, voire les censurer entièrement?

Belle preuve de pluralisme.

Stéphane Dohet a dit…

Attention, un nom de commune wallonne "à consonance néerlandaise" ne signifie pas que ce fut une commune flamande, mais bien que son origine, son étymologie est germanique, franque plus exactement. Un exemple parlant, Roux, Le Roux, Le Rœulx, Rhode ont tous la même origine, le germanique "rotha" qui signifie défrichement. Ces communes sont-elles flamandes pour autant ?

Le suffixe -becq n'est pas la traduction du néerlandais "beek", mais du germanique "baki", comme le suffixe -bais de Corbais, Moulbaix... Ce sont les envahisseurs francs qui ont nommé nombre de villages de Wallonie, mais leurs populations étaient bel et bien romanes. La frontière linguistique est stable depuis mille ans.

Il n'y a que les extrémistes du Belang pour revendiquer des communes wallonnes sur base de leurs noms "à consonance néerlandaise".

Heraus a dit…

Vous ne maîtrisez pas les règles de base de la linguistique. Une commune avec un suffixe en -becq atteste d'une évolution néerlandaise in situ du suffixe germanique en question. Les règles de la linguistique romane ne permettent pas une telle évolution.

Ainsi, grâce à l'évolution du suffixe latin -aniacas qui donne -ignies en gallo-roman picard et -enaken en néerlandais, on peut facilement reconstituer la frontière linguistique ancienne et constater qu'elle a très peu bougé en Belgique. Parfois même, il y a double tradition ce qui reflète un caractère de marche : ainsi Russeignies à coté de Renaix en Flandre témoigne de la présence de communautés picardes dans le lieu, sachant que les néerlandophones de l'endroit n'avaient jamais cessé de dire ce hameau Rozenaken. Le nom flamand de Dottignies, Dottenijs, n'est qu'une reprise tardive du nom roman : on devrait avoir Dotenaken.

Le suffixe germanique -ingen est réduit à -in dans des zones de tradition romane. Dans les régions autrefois néerlandophones puis passées à la langue romane, le suffixe a été malhabilement adapté -eghien, parfois -ingues. La commune d'Œudeghien a ainsi été nécessairement néerlandophone avant que son nom ne soit adaptée à la langue romane.

On peut aller plus loin : qui peut raisonnablement croire que l'on n'a pas parlé flamand au Sud de Tubize et d'Enghien ? Oisquercq, Rebecq, Steenkerque, ... Comme vous le dites vous-même, il y a des évolutions flamanes et des évolutions romanes des même suffixes : -baki donne -bais/baix en roman. Si une commune aujourd'hui romanophone est formée sur la variante néerlandaise de ce même suffixe, ça veut quand même dire quelque chose. La frontière linguistique a progressé vers le Nord au fil des siècles. Il en est de même au Nord de Liège avec le suffixe -enge (Bassinge, Roclenge, ...) alors que Houtain fait état de la version romane du même suffixe d'origine germanique. La frontière a progressé sur deux-trois villages et au fond, les Fourons étaient le témoignage contemporain d'un tel phénomène, à savoir que Liège irradiait sur son Nord.